Caïrns bretons et britanniques à l’Allemagne?
Alors qu’André Malraux, le célèbre homme politique français, écrivain et archéologue, visitait le célèbre caïrn de Barnenez, en Bretagne (fig. 1), après qu’il eut été restauré, il s’est écrié devant la foule rassemblée : “Le voici, votre Parthénon!”.
Les Allemands n’auraient-ils pas encore plus de raisons de se réjouir de la découverte de tels caïrns en Allemagne, d’autant plus qu‘ils sont plus hauts et plus étendus que ceux de nos voisins gaulois? Et pourtant les archéologues du Land de Bade-Wurtemberg semblent toujours ne pas croire à ces découvertes, que l’auteur du présent article a faites, il y a maintenant bientôt deux décennies, dans les forêts du Kraichgau et du Zabergäu.
Pourtant les caractéristiques des parties mises au jour sont très similaires à ce qu’on sait des caïrns de France. Les archéologues allemands n’ont eu besoin qu‘à faire cette comparaison.
Jusqu’ici, 3 couloirs ont été découverts, qui ont ou avaient un plan en forme de L, dans le caïrn de Kürnbach (fig. 2), celui de Pfaffenhofen (fig. 3), et du Marsberg près de Würzburg (fig. 4).
Ces structures que l’on appelle „dolmens à couloirs coudés“ dans l’archéologie française, se trouvent principalement en Bretagne dans le Morbihan (fig. 5).
C’est le plan de base du caïrn de Kürnbach (fig. 7) qui présente le plus de similitudes avec celui du caïrn de Barnenez (fig. 6). Ils sont tous les deux composés de deux caïrn séparés à l’origine qui, de l’avis des fouilleurs, sont de différentes périodes, et ont été juxtaposés. A Barnenez, le caïrn primaire est plus élevé que le caïrn secondaire. C’est aussi le cas à Kürnbach. Un mur dégagé lors des excavations sépare les deux parties d’ouvrage. Alors que le caïrn de Barnenez possède 11 couloirs, on n’en a retrouvé jusqu’à présent qu’un seul sur la Sommerhälde de Kürnbach. Des mesures géoélectriques faites par l’Université de Karlsruhe ont cependant révélé la présence d’une autre cavité dans le sol.
Le principe fondamental de construction des caïrns mégalithiques, consistant en des murs de soutien concentriques, a également été constaté en Allemagne. On a mis au jour ce type de mur, épais de plus d’un mètre, à l’intérieur du plus haut tumulus de pierres du sud de l’Allemagne, la Zwerchhälde de Sternenfels, et la Steingrub près de Schmie (fig. 8).
Ce qui a cependant empêché les archéologues allemands de croire à cette découverte sensationnelle, c’est le fait que ces murs aient été érigés dans des carrières de pierres.
Des parois rocheuses, souvent plus basses que les impressionnants tumulus, entourent tous ces caïrns qui étaient autrefois désignés sous le nom de Hälden, un mot qui vient de Halde, employé dans Abraumhalde, avec le sens de ‘terril’, mais qui à l’origine avait une connotation sacrée, car Holda était la déesse germanique du royaume des morts. De grandes surfaces de ces parois rocheuses montrent aujourd’hui encore des hachures qui n’ont pu être faites qu’avec un ciseau, une pioche ou le marteau à deux pointes des travailleurs dans les carrières (fig. 9).
Ce dernier a été utilisé lors de la méthode dite du fossé, qui est très ancienne. Non seulement les Romains l’utilisaient, par exemple, pour la supposée carrière romaine de « Kriemhildenstuhl », près de Bad Dürkheim, mais déjà les Egyptiens ont taillé les gigantesques blocs destinés aux pyramides avec de tels marteaux. On peut toujours voir ces typiques hachures dans les carrières le long du Nil qui ont servi à la construction des pyramides (fig. 10).
Si nous utilisons la datation des carrières égyptiennes pour dater les sites du Néolithique, du Cuivre et du Bronze, dans les carrières que nous étudions, cela s’inscrit dans le schéma chronologique connu de la Préhistoire et de la Protohistoire.
Les hommes de ces époques auraient tapé avec les outils que l’on connaît, donc des haches d’obsidienne et des hachettes en cuivre, sur la roche dure jusqu’à ce qu’elle cède. C’est ainsi, en tout état de cause, que les blocs des grandes pyramides auraient été taillés. Pour qui veut le croire…Hérodote décrit plutôt que de grandes quantités de fer avaient été utilisées lors de la construction de la pyramide de Chéops. Notre schéma chronologique ne peut donc pas être juste.
Pourtant ici, dans les carrières allemandes présentant des caïrns d’aspect breton, nous trouvons également dans les galeries et murets des tumulus, des pierres qui y ont été intégrées et qui montrent ces hachures bien marquées, qui n’ont pu être provoquées que par du fer dur.
Avant tout, dans les trois chambres bien accessibles (fig. 11, fig.12 et fig.13) des caïrns sur le Marsberg, près de Randersacker, rassemblés tous ensemble dans une « carrière » longue d’1,3 km de long on peut le voir de visu.
Un critique de nos fouilles, le doyen cantonal du patrimoine Herbert Haas de Würzburg, prit ce fait comme motif, de remettre en question ces trouvailles. Nos ancêtres les Celtes – d’après ce qu’il explique dans un article de la Main-Post du 13/08/2004 (« Cavités pour bière et explosifs ») – n’auraient pas encore connu le marteau à deux pointes en fer (fig. 15).
Les galeries et chambres auraient été construites seulement par les travailleurs de la carrière. Si tel était le cas, ils auraient encore employé la technique des maîtres constructeurs des Mégalithes, car les galeries qui sont à visiter là-bas ressemblent de façon frappante à celles des civilisations mégalithiques de l’Europe de l’ouest et du nord-ouest, qui presque toutes sont couvertes de plaques rocheuses pesant des tonnes, et de ce fait ont été appelées « dolmens » par les archéologues.
Il n’est pas vrai non plus que les Celtes n’ont pas connu le marteau à deux pointes. Cet outil qui a seulement été utilisé dans les carrières, était apparemment si répandu dans les pays celtiques que même les barres de fer ont été fondues dans ces moules, où les marteaux en forme de cône l’ont été
(fig. 16, fig. 17 et fig. 18).
Ces barres de fer ont été trouvées si fréquemment que presque chaque musée en Allemagne exposant des pièces celtiques en possède un grand nombre. Du fait de ces énormes quantités, elles servaient selon la théorie officielle comme moyen d’échange, voire de monnaie. L’acheteur avait la possibilité de les transformer rapidement en n’importe quel outil ou arme désirés.
Jusqu’à présent aucun archéologue allemand n’a encore pensé que ce serait le plus simple de fabriquer à partir de cette pièce un marteau à deux pointes pour le travail dans les carrières qui, suppose-t-on, étaient très répandues à cette époque.
Il suffisait alors de porter à incandescence dans le foyer de forge la partie médiane la plus épaisse du marteau, de battre le manche avec un tuyau aiguisé et y introduire la tige solide. Le fer encore rouge avait l’avantage qu’en se refroidissant il se refermait étroitement autour du manche en bois et formait ainsi un ensemble à l’épreuve de n’importe quel coup brutal. On utilise encore cette technique dans la fabrication de tonneaux de vin, quand le tonnelier fait glisser les cercles portés au rouge autour des éléments en bois avant de les laisser refroidir.
L’auteur désigne les caïrns allemands volontiers en tant que pyramides à degrés, non sans raison, car les archéologues français les appellent de même ainsi. Des scientifiques connus comme le professeur Giot, le Dr Jean-Pierre Mohen et le Dr Roger Joussaume mettent au même niveau les caïrns français et les pyramides à degrés d’Egypte, car ils suivent les mêmes principes de construction. Ce ne sont pas des degrés horizontaux qui sont superposés, mais on a ajouté des murets toujours inférieurs autour du centre de la construction : une tour avec la chambre funéraire, ce sont ces murets qui forment les degrés de la pyramide.
Ici en Allemagne, il existe en effet un monument, qui jette dans l’ombre tout ce que l’on sait jusqu’à présent de la protohistoire européenne. C’est une construction à 5 étages, dont la longueur d’arête mesure – on ne peut pas se l’imaginer – 440 m : le Bärenstein près de Horn et Bad-Meinberg dans la forêt de Teutoburg (fig. 19). Il fut naguère érigé directement à côté des fameux Externsteine, et sa paroi rocheuse interne, avec une hauteur de plus de 30 m, se trouve exactement dans le prolongement de ces tours rocheuses apparemment faites de main d’homme.
Les Externsteine (fig. 20) avec leurs cavités rocheuses impressionnantes en provenance d’une époque mystérieuse et inconnue, ont donc été creusées dans la paroi rocheuse d’une carrière. Avec le Bärenstein, seulement séparé par le petit lac, les Externsteine forment un ensemble frappant d’architecture cultuelle protohistorique sur une superficie vaste, comme cela n’existe que dans les grandes civilisations de l’humanité.
Le complexe Externsteine-Bärenstein s’intègre ainsi dans les installations funéraires comme les Pyramides et temples de Gizeh et les villes saintes des Mayas au Mexique et au Guatemala avec leurs pyramides à degrés.
L’auteur remercie François de SARRE et Karin WAGNER pour leur traduction au français de cet article.
K. Walter Haug, Karlsruhe · 2008